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1 décembre 2009 2 01 /12 /décembre /2009 20:36
Béni Dejmhour est l’un des plus grands et plus beaux villages de la commune d’Amalou, dans la wilaya de Béjaïa. Bien que majestueux, il est en quête d’un développement plus prononcé dans divers domaines d’activité, notamment en direction des jeunes. C’est en arrivant au niveau du carrefour de la localité de Mouhli que nous avons quitté le CW 141 pour emprunter une route communale sinueuse montant jusqu’au lieu de notre destination. Goudronnée il y a une dizaine d’années, elle n’enregistre qu’un faible trafic routier, attestant ainsi de l’isolement de cette région qui ressemble à un îlot de verdure où prédomine une pinède de pins aux senteurs envoûtantes. Les yeux aussi s’émerveillent des paysages enchanteurs qu’offre gracieusement la nature. A ce décor naturel d’une grande magnificence, s’ajoute le gazouillement des oiseaux migrateurs tels que les éperviers et les étourneaux fuyant les frimas hivernaux de l’Europe pour retrouver le climat doux de chez nous et les olives noires dont ils se nourrissent. En cette belle journée automnale dominée par un doux soleil, un ciel bien éclairci et un vent qui gémit dans la vallée faisant tomber sur des jachères les feuilles mortes des arbres, au fur et mesure que l’on gagne en altitude, nous ressentons un froid sec qui va s’accentuant. Nous sommes en pleine campagne de cueillette d’olives et les champs grouillent de femmes et d’hommes qui travaillent comme des fournis pour engranger les récoltes avant l’arrivée des pluies qui rendent les champs impénétrables. Des haies de cactus bordent des régiments d’oliviers prédominants et un peu moins de lignées de figuiers. C’est au détour d’un virage qu’apparaît le village mythique de Béni Djemhour, haut perché sur la montagne, à quelque 1 200 mètres d’altitude. Une altitude qui a ses effets néfastes comme les chutes de neige de l’année 2005 qui ne se sont pas arrêtées trois jours durant. Et cette poudreuse est encore vivace dans les esprits. Les accès routiers étaient bloqués et la population, prise au dépourvu, tremblotait de froid, par manque de bonbonnes de gaz butane. A travers une vue imprenable, le village domine toute la plaine de la haute vallée de la Soummam et le flanc est des monts du Djurdjura. La nature a généreusement doté d’un environnement sauvage de toute beauté cette bourgade où on aimerait s’évader quelques jours pour humer un air pur bienfaiteur pour les poumons usés par la pollution en tout genre de la ville. Cependant, le plaisir procuré par des vues panoramiques émouvantes s’estompe par une autre image. Celle d’hommes emmitouflés dans des burnous blancs, assis au soleil sur la petite placette. Mais assis sur des pierres. La détresse qui étreigne leurs cœurs se lit facilement sur les visages ridés. Dans ce village d’environ 1 000 habitants, les résidents n’ont pas tardé à nous égrener un chapelet d’insuffisances. Notamment un manque criant d’infrastructures à caractère éducatif, culturel et économique qui leur compliquent une vie déjà difficile à supporter en raison de contingences climatiques. Le moins que l’on puisse dire, la frange qui subit le plus le poids du sous-développement dans ce village enclavé reste incontestablement celle des jeunes. L’oisiveté est la mère de tous les maux, de tous les vices, ne manque-t-on pas de dire assez souvent. L’absence indéniable de perspectives d’emplois et de loisirs tourmente dans leur vie quotidienne des jeunes gagnés par la solitude, l’oisiveté, la monotonie. Désœuvrés et livrés à eux-mêmes, ils sont à la merci de divers maux sociaux (drogue, alcoolisme…) qui les guettent à tout bout de champ. «L’absence d’une maison de jeunes est fortement ressentie par une jeunesse manquant terriblement de loisirs. Des jeunes qui, alors, flânent sur la route, se regroupent dans les placettes ou emplissent les cafés. Nous souhaitons vivement que les pouvoirs publics se penchent sur notre triste sort en nous mettant du baume au cœur par l’inscription de projets de développement, comme une bibliothèque ou un foyer pour jeunes où nous pourrions nous adonner à des activités culturelles, éducatives, scientifiques. L’absence d’Internet dans cette bourgade pénalise les jeunes à plus d’un titre, les contraignant à faire des kilomètres pour s’adonner au plaisir de surfer sur la toile. Au-delà des bienfaits que cela leur procure, à travers l’ouverture un tant soit peu, sur le monde, ils perdent quand même de l’argent et du temps. Pis encore, quand quelqu’un est bercé par une bonne connexion, il rentre à pied dans les ténèbres de la nuit, faute de transport. La seule infrastructure de fortune pour jeunes existante dans le village est le terrain de jeux de proximité. Beaucoup de jeunes y étalent leur talent lors de tournois de football inter-villages que nous organisons en été. Certains ont été récompensés en gagnant leur place dans des équipes évoluant dans les championnats de wilaya», nous a longuement raconté un jeune en nous décrivant la situation alarmante vécue dans ce village. Un plan de développement à booster Un village qui a beaucoup donné à l’Algérie en sacrifiant ses meilleurs fils pour l’indépendance chèrement acquise. Sur le plan social, la situation n’est guère reluisante tant les insuffisances se conjuguent au présent. Ainsi, la fermeture du centre de soins a beaucoup frappé les esprits de citoyens médusés qui n’arrivent pas à comprendre l’attitude des pouvoirs publics à travers cette décision. «Au moment ou l’on s’attendait à l’affectation d’un médecin pour une bonne couverture médicale, les pouvoirs publics ont décidé de fermer carrément le centre de soins, sans se soucier des déboires supplémentaires affectant des citoyens vivant dans le dénuement total. Avec une bourse déjà fragile quand elle n’est pas vide, les malades doivent parcourir près de 8 kilomètres à pied ou prendre un taxi pour aller se soigner à la polyclinique d’Amalou», clame avec dépit un autre citoyen. Et d’ajouter : «A Béni Djemhour, nous sommes également confrontés au problème de transport. Pour aller à Akbou, une ville se trouvant à 22 kilomètres de notre village, on sacrifie une journée complète. L’absence de transport en commun nous oblige à rester des heures durant à faire le pied de grue au niveau de l’arrêt de bus pour pouvoir prendre un hypothétique taxi ou s’attacher les services d’un chauffeur de taxi clandestin, au prix fort. N’est-il pas du ressort de la direction des transports de Béjaïa d’orienter ou d’obliger le cas échéant les demandeurs d’autorisation de transport public à accepter la ligne sur Béni Djemhour ?» Notre interlocuteur n’a pas omis de se pencher également sur la scolarité difficile des collégiens, qui doivent se rendent jusqu’à Amalou pour étudier. «On aimerait avoir un CEM pour mettre fin aux dangers de la route encourus par nos enfants qui doivent emprunter un itinéraire de 8 kilomètres pour aller étudier au collège d’Amalou», se plaint-il. Quoi que l’on dise sur la misère qui sévit, cette bourgade a bénéficié tout de même, en 2007, d’un plan de proximité de développement intégré (PPDRI), accordé pas les pouvoirs publics pour le développement des activités agricoles. «Nous avons bénéficié d’une enveloppe budgétaire de 37 millions de dinars, destinée à la réalisation de plusieurs projets initiés par les jeunes propriétaires de terres agricoles. 20 millions rentrant dans le cadre des projets collectifs ont permis l’aménagement de la route reliant Béni Djemhour au chef-lieu et du terrain de sports de proximité, ainsi que l’ouverture de pistes agricoles et la réalisation et la rénovation de réseaux hydrauliques. 17 millions ont par ailleurs été affectés, dans le cadre des projets individuels, aux jeunes désirant créer leur propre entreprise. Ainsi beaucoup de jeunes chômeurs ont pu souscrire à ce plan de développement, ce qui leur a permis de s’investir pleinement dans l’élevage d’ovins et de caprins, une activité adaptée en zone montagneuse. Il faut dire aussi qu’une vingtaine de citoyens ont bénéficié de l’aide à la construction d’un logement rural rentrant dans le cadre du Fonal», a tenu à nous dire un jeune, visiblement heureux de pouvoir gagner sa vie dans son village même en exploitant les terres léguées par ses parents, et ce grâce aux crédits obtenus. Le développement du monde rural semble être le souci permanent des pouvoirs publics qui ne lésinent sur aucun moyen pour apporter les commodités indispensables à une vie décente des populations rurales souffrant de l’absence de moyens des plus élémentaires, notamment dans les localités enclavées. Le PPDRI répond justement à cet objectif de développement du monde rural, pour peu qu’il ne soit pas pris dans les méandres de la bureaucratie qui décourage plus d’un. En ce sens, beaucoup de jeunes souhaitent l’allégement des dossiers à constituer pour se prendre en charge. L. Beddar
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